Maternité de substitution: à quel prix?

La grande reporter Julie BINDEL signe une enquête sur la maternité de substitution (ou « gestation pour autrui »), invitant ses lectrices et lecteurs à dépasser les discours propagandistes.

« Ne vous attardez pas sur les articles de propagande, écrit-elle dans le Daily Standard ce matin, la maternité de substitution ne relève pas des droits des gays; c’est avant tout une question de droits des femmes. »

La maternité de substitution, dans laquelle une femme porte et met au monde un bébé pour une autre personne ou un couple, est depuis longtemps un sujet controversé. Mais avec sa normalisation croissante et le nombre croissant d’hommes homosexuels qui choisissent la maternité de substitution pour créer leur propre famille, le débat sur son éthique a été relancé. L’année dernière, le cinéaste israélien Yuval Hadadi, dans une discussion sur son nouveau film, a accusé les couples de traiter les bébés nés grâce à la maternité de substitution comme des « symboles de statut social », ajoutant qu’il existe « une pression et une attente » pour que les hommes homosexuels acquièrent des enfants.

J’ai visité un certain nombre de pays, comme l’Inde, qui offrent des services de location d’utérus et j’ai vu les mères porteuses être traitées plus mal que des vaches laitières.

Mais j’ai également entendu une terrible propagande anti-gay de la part de ceux qui s’opposent non pas à la maternité de substitution mais aux couples homosexuels ayant des enfants.

Le nombre d’enfants placés en institution, désespérant d’avoir une famille, ne cesse de croître. Pendant ce temps, selon l’organisation Surrogacy UK, depuis 2010, le nombre de « futurs parents » de même sexe qui contactent l’organisation est en augmentation, et représente actuellement près de 50 % de sa clientèle.

Parler de « maternité de substitution altruiste » – un arrangement où la mère porteuse n’est payée que pour ses frais et le fait à titre de faveur – est un faux-fuyant. En Grande-Bretagne, une mère porteuse peut réclamer 15 000 £ de frais – l’équivalent d’un salaire annuel pour de nombreuses femmes exerçant un travail mal rémunéré – ce qui en fait un incitatif visant les femmes en situation désespérée.

La maternité de substitution commerciale réduit l’intérieur du corps d’une femme à un distributeur automatique

Des appels sont lancés depuis longtemps en faveur de la légalisation de la maternité de substitution commerciale au Royaume-Uni, à l’instar d’un certain nombre d’autres pays tels que l’Ukraine, l’Inde et le Mexique. Les partisans de la GPA font valoir que les femmes ne sont pas exploitées puisqu’elles sont payées pour leur « service ». Mais cela réduit l’intérieur du corps d’une femme à un distributeur automatique.

J’ai parlé à une femme britannique qui a subi des pressions de la part de son mari violent pour qu’elle conclue un accord de maternité de substitution afin de rembourser ses dettes à lui. Une autre, Alison*, qui a déjà deux enfants, s’est vue demander de porter un enfant pour un couple gay. Alison me raconte que dès qu’elle a été enceinte, les futurs parents ont tenté de contrôler sa vie, lui dictant ce qu’elle pouvait manger et boire, lui envoyant constamment des SMS. « J’étais considérée comme leur propriété, dit Alison, mais ils ne se souciaient que de ce qui était dans mon ventre et pas un seul instant de moi. »

La maternité de substitution est également commercialisée auprès des hommes célibataires. Selon l’Organisation mondiale de la santé dans sa mise à jour de 2016 sur la maternité de substitution et le droit international : « Les hommes et les femmes célibataires sans problèmes médicaux [sont] considérés comme « stériles » s’ils n’ont pas d’enfants mais veulent devenir parents. »

J’entends souvent des gens dire : « Comment les hommes pourraient-ils avoir un bébé sans accès à une femme ? » Mais depuis quand avoir un enfant biologique est-il devenu un droit de l’homme ? Des mères porteuses m’ont parlé de la douleur émotionnelle que représente le fait de donner un bébé, et certaines sont même mortes à la suite de complications.

En outre, les femmes qui portent ces ovules fécondés doivent prendre plusieurs médicaments pour aider à mener à bien la grossesse, et ces produits peuvent tous avoir de graves effets secondaires.

Et si de nombreuses mères porteuses ont tendance à être défavorisées, souvent des femmes pauvres, les donneuses d’ovules sont souvent choisies pour leur apparence, leur bonne santé ou leur talent mathématique ou musical. Lorsque de tels calculs entrent dans le processus, cela s’apparente à de l’eugénisme.

Une chose est certaine : la maternité de substitution n’est pas une question de droits des gays, mais de droits des femmes.

*son nom a été modifié aux fins de cet article.

Julie Bindel est journaliste, autrice et militante féministe

Version originale : https://www.standard.co.uk/comment/comment/surrogacy-is-not-a-gay-rights-issue-it-is-a-women-s-rights-issue-a4568716.html?

Documentation: https://fr.wikipedia.org/wiki/Gestation_pour_autrui et « Blog du Collectif pour le respect de la personne (CoRP)« : https://collectif-corp.com/qui-sommes-nous/membres-du-corp/

Lire aussi: « All surrogacy is exploitation – the world should follow Sweden’s ban », par Kajsa Ekis Ekman

Traduction : TRADFEM

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