Par Jo Bartosch @jo_bartosch, sur le site CAPX
La notion que des femmes puissent se mobiliser pour défendre leurs droits irrite grandement certaines personnes.
La police se montre souvent plus intéressée par les tweets dits blessants que par les menaces réelles de violence.
Les transactivistes extrémistes ne sont pas seulement une nuisance, mais une menace explicite pour la liberté d’expression collective.
Le terme « fascisme » semble avoir fait l’objet d’une mise à jour inclusive. Malheureusement, cela ne signifie pas que les skinheads en sont venus à embrasser l’harmonie raciale, mais que le terme lui-même est de plus en plus interprété de manière extrêmement libérale.
Le week-end dernier, des transactivistes ont hurlé ce nouveau « mot en F » à divers groupes de femmes qui avaient osé se réunir au Royaume-Uni pour parler de leurs droits. Parmi leurs cibles figuraient des lesbiennes âgées réunies pour le lancement du Lesbian Project à Bloomsbury, des femmes de gauche assemblées à Manchester pour discuter de la Loi britannique sur l’égalité et des partisan-es du mouvement Let Women Speak qui s’étaient rassemblé-es au Speakers’ Corner de Hyde Park, à Londres. Chacun de ces groupes a été encerclé et traqué par des foules de transactivistes se disant « antifascistes », pour la plupart des étudiant-es, qui scandaient des slogans tels que « Grattez une fash [fasciste] – c’est faire saigner une TERF [féministe radicale excluant les trans]« .
Bizarrement, en 2023, l’idée que des femmes s’organisent pour défendre leurs droits semble être devenue un irritant pour certains jeunes. Quelques-uns des participants à ces manifestations sont eux-mêmes transgenres, tandis que d’autres brandissent des pancartes se déclarant des « fiers alliés ». Tous semblent désireux de mériter leurs galons dans ce qu’ils et elles croient sincèrement être la lutte pour les droits civiques de leur génération. Comme l’ont dit pompeusement des manifestant-es contre le lancement du Lesbian Project, « nous ne permettrons pas que nos frères et sœurs trans soient effacés et exclus ». Mais le fait est que certaines des revendications des gens qui s’identifient comme trans ne peuvent être satisfaites qu’en sapant les droits fondés sur le sexe dont dépendent les femmes.
Il est facile de comprendre pourquoi tant de membres de la génération Z n’arrivent pas à comprendre la raison d’être du critère du sexe. Pour les jeunes qui n’ont jamais eu à se battre pour obtenir un congé de maternité légal ou pour que le viol dans le mariage soit considéré comme une infraction pénale, le rappel que les femmes et les hommes sont différents peut sembler régressif. Quant aux jeunes qui sortent aujourd’hui des écoles, il est probable qu’on leur a enseigné, dans le cadre de cours spécialisés, que chaque personne a une « identité de genre » qui devrait avoir priorité sur son corps sexué. Mais rejeter cette hypothèse, comme le font la plupart des plus de 35 ans, revient à saper les fondements de l’idéologie transgenriste ou, dans le nouveau jargon des jeunes activistes, à « nier l’existence des personnes transgenres ». Et le fait d’exprimer publiquement un tel scepticisme est considéré comme une menace pour une minorité marginalisée.
Une fois que l’on a avalé cette vision déformée du monde, le fait de menacer, harceler et silencier les gens qui considèrent le sexe comme une réalité immuable devient une obligation sociale. L’ironie qu’un tel autoritarisme se dise « antifasciste » est si parfaite qu’il serait tentant d’en rire si la menace n’était pas aussi grave.
Vendredi, des images en provenance de Nouvelle-Zélande ont montré la militante des droits des femmes Kellie-Jay Keen entourée de ses gardes du corps et stewards, forcée de se frayer un chemin à travers une foule en furie sous une volée de coups de poing, de projectiles et d’insultes. La Britannique de petite taille, mère de quatre enfants, a finalement été aidée à monter dans une voiture de police. À son retour au Royaume-Uni, Mme Keen a déclaré qu’elle avait de la chance d’être encore en vie et qu’en raison de menaces de mort, elle avait dû être placée sous la protection de la police avant de prendre l’avion du retour.
Si Mme Keen avait parlé des droits des femmes et des filles dans un État régi par la charia, on aurait pu s’attendre à cette réaction violente et surexcitée. Mais elle se trouvait dans un pays démocratique où la loi reconnaît aux femmes le statut de personne à part entière. Le message de Mme Keen n’a rien d’extrême : elle rappelle que les femmes sont des êtres humains adultes et que, quelle que soit l’identité qu’ils s’arrogent, des hommes ne devraient pas être autorisés à pénétrer dans les espaces réservés aux femmes. Mais pour les transactivistes, cela fait d’elle une « fasciste » et, à ce titre, une cible légitime.
Le traitement réservé à Mme Keen n’est pas passé inaperçu. Une lettre rédigée par un certain nombre de groupes de défense des droits de l’homme critiques à l’égard du genre a appelé le secrétaire d’État néo-zélandais aux affaires étrangères, James Cleverly, à condamner les manifestants violents. M. Cleverly n’a pas encore daigné y répondre, mais le ministre néo-zélandais de la police, Chris Philp, a déclaré qu’il était tout à fait inacceptable que la militante britannique ait été « maltraitée par une foule en délire », ajoutant que « la façon dont les droits des femmes ont été menacés par la communauté transgenriste est profondément préoccupante ».
Le fléau des militants transactivistes agressifs et autoritaires est mondial, mais la Grande-Bretagne mène la riposte.
Un rassemblement du mouvement « Let Women Speak » au Speakers’ Corner de Hyde Park dimanche avait déjà été planifié avant les événements de Nouvelle-Zélande, mais son nombre de participant-es a augmenté suite à l’attaque lancée contre Mme Keen. En quelques minutes, le groupe a cependant été encerclé par des transactivistes qui ont tenté d’étouffer la prise de parole des femmes à l’aide de haut-parleurs et de porte-voix, dont l’utilisation est pourtant interdite au Speakers’ Corner.
C’est au même endroit, en 2017, que la féministe Maria MacLachlan a été agressée par un autre transactiviste alors qu’elle attendait de se rendre à un événement féministe. Au cours des six dernières années, les transactivistes ont régulièrement bénéficié de la faveur des médias et se sont radicalisés, mais l’opposition à leurs revendications s’est également accrue.
L’attitude de la police est aussi très préoccupante : des militant-es se plaignent depuis longtemps de l’approche partisane des forces de l’ordre, qui mettent en garde des citoyen-nes ordinaires pour avoir prétendûment blessé les sentiments de transactivistes dans les médias sociaux, mais ne protègent pas les femmes contre des hommes violents. Et selon Venice Allan, l’une des organisatrices du rassemblement de dimanche à Hyde Park, la police « a assuré notre sécurité physique mais n’a pas protégé notre droit à la liberté d’expression ». Comme le dit Allan, le fait est que « les femmes sont tenues à un niveau de comportement bien plus élevé que ces voyous, puisque le simple fait de reconnaître qu’une femme est un être humain femelle est considéré comme une indication dangereuse de tendances d’extrême-droite ».
Ces transactivistes extrémistes doivent être reconnus non seulement comme une nuisance, mais aussi comme une grave menace pour la liberté d’expression et la sécurité des femmes. Comme tous les fondamentalistes, ces personnes sont ivres de leur propre sens de la justice. Leurs tactiques empêchent tout progrès, car qualifier un opposant politique de « fasciste » revient à le prendre pour cible, à délégitimer ses arguments et à déshumaniser ceux et celles qui les avancent. C’est pourquoi le gouvernement et les forces de l’ordre doivent défendre vigoureusement le droit des femmes à la liberté d’expression, de réunion et de conscience. Agir autrement est non seulement un affront aux femmes, mais à la démocratie elle-même.
Jo Bartosch
Jo Bartosch est une journaliste britannique qui défend les droits des femmes et des jeunes filles.
Traduction : TRADFEM
Source : https://capx.co/anti-fascist-trans-activists-are-a-threat-to-democracy/
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