Par Josephine Bartosch, sur 4W, le21 septembre 2022

Illustration par Reality Girl.
Les jeunes vedettes interviewées dans le plus récent film de Jennifer Lahl, Detransition Diaries, ne pourront jamais échapper aux erreurs qu’elles ont commises à leurs débuts dans la vie ; elles sont condamnées à les porter dans leur corps et à les entendre dans leur voix pour le reste de leur vie. Mais en partageant leur histoire et en parlant du mal qui leur a été fait, les trois jeunes femmes transgenres présentées, Helena, Cat et Grace, pourraient éviter à d’autres de croire au mensonge selon lequel l’on peut changer de sexe. Et, chose peut-être surprenante, le ton du documentaire de Lahl est plein d’espoir; les personnes interrogées ne sont pas simplement présentées comme des victimes, mais comme des survivantes.
Lahl est une cinéaste et une militante expérimentée. En tant que présidente du Center for Bioethics and Culture Network, les sujets qu’elle aborde sont ceux sur lesquels la gauche libérale préfère fermer les yeux. Elle dissèque la politique contemporaine du corps et offre aux femmes molestées par les industries de la transsexualité et de la fécondité une plateforme pour parler de leur exploitation.
Pour toute fille, devenir femme est un processus qui consiste à apprendre à se conformer à un ensemble de règles cruelles, à découvrir ce qu’il est « acceptable » de ressentir et de faire. On a dit à Helena, Cat et Grace qu’une « transition » leur permettrait de se soustraire aux limitations injustes imposées à leur corps féminin en développement. Leurs témoignages sont des histoires familières d’angoisse adolescente, elles parlent de la confusion d’essayer de trouver une place dans un monde qui est hostile aux jeunes femmes.
Mais si les sentiments en cause sont anciens, la « solution » vendue à ces femmes est relativement nouvelle. Et comme pour n’importe quelle mode, les adeptes de la tendance à la transition comprennent des adultes autrement responsables qui devraient être mieux informé·es. Helena, la première personne interrogée, ouvre le film en expliquant que « avant d’être trans, aucun des adultes de ma vie ne se souciait vraiment de mes problèmes… mais quand j’ai dit que j’étais trans, ils ont tous voulu se plier en quatre pour m’aider à être trans ».
Helena explique avec force comment le mouvement de justice sociale auquel elle a participé l’a laissée se sentir invisible et « coupable d’être une femme cis et blanche ». Sa peur d’être perçue comme privilégiée est palpable ; voudriez-vous grandir pour devenir ce qu’on appelle maintenant « une Karen » ? Pourtant, pas un·e seul·e des adultes qui auraient dû la protéger ne lui a dit qu’il était normal d’être simplement elle-même.
On peut penser que c’est parce que soutenir une personne transgenre dans son voyage pour transitionner vers « son moi authentique » est plus valorisant que d’aider une jeune fille vulnérable à traverser ses difficultés de croissance. Et chacune de ces jeunes femmes cherchait désespérément des réponses. Ignorées en tant que filles, elles ont cru que la « la transition » résoudrait leur détresse. Au lieu de cela, elles ont été utilisées comme accessoires dans des postures de justice sociale adoptées par d’autres personnes.
Detransition Diaries n’est pas le premier film à porter un regard exploratoire et critique sur le phénomène de la dysphorie de genre. L’année dernière, Vaishnavi Sundar, militante des droits des femmes, a publié un documentaire en quatre parties intitulé Dysphoric, qui comprend des témoignages de clinicien·nes, d’activistes et de transsexuel·les. Sundar est une féministe indienne, et Lahl une militante étasunienne spécialisée en bioéthique. Pourtant, malgré des différences idéologiques et géographiques évidentes, il existe des similitudes frappantes dans les expériences qu’elles relatent. Les thèmes centraux des deux films sont les clinicien·nes aveuglé·ds par leur idéologie, la puissance de la nouvelle industrie de la transition et la grande vulnérabilité des adolescentes.
Le film de Lahl met en évidence un manquement stupéfiant à leur mandat de la part des professionnel·les de la santé. Les gens qui ne vivent pas aux États-Unis seront peut-être choqués de découvrir que Planned Parenthood, le principal fournisseur de services de contrôle des naissances en Amérique du Nord, prescrit également des hormones transsexuelles aux jeunes qui s’identifient comme trans. Cat se souvient qu’elle a appelé cet organisme pour obtenir une lettre d’autorisation pour subir une double mastectomie, appelée par euphémisme « chirurgie du haut » dans la communauté des transitionneuses. L’opération a été organisée par téléphone, sans évaluation en personne. Chacune de ces femmes a décrit comment son projet a été aveuglément confirmé par des cliniciens et des conseillers à chaque étape. Il semble que dès qu’une patiente se déclare « trans », toute mesure de protection ou d’examen soit écartée.
De manière plus générale, les détails fournis par les trans interviewées posent des questions difficiles aux féministes. Il est peut-être réconfortant de croire que le comportement violent des hommes est construit culturellement (c’est-à-dire le genre), et non naturel, car il peut alors être défait par des changements sociaux. Mais en écoutant les jeunes femmes interrogées parler de l’impact de la prise de testostérone sur leur humeur et leurs actions, on est amené à se poser la question inconfortable suivante : dans quelle mesure la violence masculine est-elle motivée par la testostérone ? Malheureusement, il est peu probable qu’une recherche non politisée sur les origines des différences entre le sexe et le genre soit entreprise dans le climat culturel actuel.
Ce qui est peut-être le plus choquant dans Detransition Diaries, c’est de constater à quel point les victimes de l’industrie transgenre sont jeunes. Vers 2015, à une époque où les femmes du Royaume-Uni commençaient à se mobiliser contre des propositions qui auraient vu l’auto-identification de genre introduite dans nos pays, Helena, Cat et Grace étaient chacune perdues dans leur illusion d’être du sexe opposé. Et pourtant, dans les années qui ont suivi, chacune d’entre elles a pris la décision de changer de sexe. Dans le cas de Cat, c’était après avoir vu une vidéo de la militante britannique des droits des femmes Kellie-Jay Keen.
En tant que femme d’âge moyen, il est évident pour moi que les sentiments qui ont conduit Helena, Cat et Grace à subir des procédures médicales dangereuses sont les mêmes que celles qui, dans les générations précédentes, orientaient les jeunes vers des piercings douteux, des vêtements noirs ou, au pire, des tatouages regrettables. Le prix de la détresse et de l’expérimentation propres à la jeunesse a été élevé pour ces femmes; aujourd’hui, elles vivent toutes avec les conséquences de leur confusion identitaire d’adolescentes.
Il est déchirant de réaliser qu’Helena, Cat et Grace ont pourtant agi de manière responsable lorsqu’elles ont ressenti une détresse dans leur corps ; elles se sont tournées vers des professionnels de la santé, vers ceux qui promettent de s’en tenir au serment d’Hippocrate, « s’abstenir de tout mal ». Pourtant, par ignorance ou par lâcheté, les thérapeutes, les médecins et les chirurgiens entre les mains desquels reposaient leurs corps les ont livrées à une machine médicale brutale. Le film de Lahl est courageux, nécessaire et fondé sur des principes. Elle invite le monde entier à écouter les récits des survivant·es de l’industrie de la transition et à prendre conscience que, malgré le mal qui leur est fait, les personnes qui transforment leur organisme peuvent apprendre à s’épanouir.
Jo BARTOSCH
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SOURCE : https://4w.pub/detransition-diaries/
TRADUCTION : TRADFEM
Réaction au passage : « Et, chose peut-être surprenante, le ton du documentaire de Lahl est plein d’espoir; les personnes interrogées ne sont pas simplement présentées comme des victimes, mais comme des survivantes. »
Il ne faut pas avoir peur de se dire victime, de dire qu’il y a des victimes, et ça n’est pas négatif ou mauvais de le dire : si il y a une victime, c’est qu’il y a un responsable, et si il y a un responsable, c’est qu’une réparation est possible. Sans reconnaissance du statut de victime, pas de réparation.
C’est pour ça qu’on lit beaucoup dans les médias capitalistes que se dire victime est un signe de faiblesse : les exploiteurs ne veulent pas qu’un jour ont viennent leur demander des comptes.
Et on se retrouve avec des victimes qui clament bravement qu’elles ne sont pas victimes, comme si être victime était infâmant. Non, c’est la reconnaissance qu’il y a eu agression, qu’il y a une cause à cette agression, et que le responsable doit répondre de ses actes.
Et ce n’est pas à chaque victime de décider si la société doit ou non réparer ou obliger les responsables à réparer. C’est une question de principe : une personne qui veut se voir reconnaître le statut de personne responsable doit répondre de ses actes, de tous ses actes, les bons comme les mauvais, c’est tout.
Il n’y a que les enfants et les personnes fragiles qui ne sont pas responsables, et ça va de pair avec un statut spécial, une reconnaissance spéciale.
Les lobby trans, les « médecins » qui prêtent leur titre et leur art à ces mutilations, ne sont pas considérés comme fous : il faut donc les considérer comme des mutilateurs responsables de leurs actes.
Sur ce passage « Il est peut-être réconfortant de croire que le comportement violent des hommes est construit culturellement (c’est-à-dire le genre), et non naturel, car il peut alors être défait par des changements sociaux. »
Le social fait beaucoup, testostérone ou non. C’est d’ailleurs pour ça qu’on ne naît pas femme (sous développée physiquement, brimée à la moindre colère, même juste et raisonnable, poussée vers des activités parfois ineptes…).
Les hommes seraient éduqués comme le sont les femmes, ils seraient sûrement moins violents, testostérone ou pas. Les femmes seraient éduquées comme le sont les hommes, elles seraient sûrement plus violentes, œstrogènes ou non.
Le film (qui a malheureusement été boudé) de Riad Sattouf, Jackie au royaume des filles, est très juste là-dessus : le social est tout, le physique n’est quasiment rien.
Les hommes noirs n’étaient pas plus faibles que les hommes blancs, et ça n’empêchait pas leur exploitation dans les plantations : la force individuelle n’était pas le problème, l’organisation sociale était le problème.
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Assez étrange de voir que des jeunes filles blanches veulent transitionner F2M pour ne pas être perçues comme privilégiées… Ce sont quand même les hommes les plus privilégiés dans les sociétés occidentales.
De même l’épidémie de transition chez les adolescentes a davantage de similitudes avec l’épidémie d’anorexie des décennies précédentes qu’avec les tatouages: le refus de la sexualité et de la féminité.
Tant que la pornographie montrera les horreurs infligées aux femmes et qu’elle sera accessible aux ados, certaines fuiront la « féminité comme une maison en flammes »!
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