Lettre ouverte publiée par le British Medical Journal (BMJ) sur les normes cliniques et la négligence constatées dans les services d’identité sexuelle

2 septembre    

Au rédacteur-en-chef,

Le Clinical Advisory Network on Sex and Gender (CAN-SG) (1), un groupe de clinicien·nes basé·es au Royaume-Uni et en Irlande qui appelle à une meilleure compréhension des effets du sexe et du genre dans les soins de santé, accueille favorablement le rapport intermédiaire et les recommandations de la Dre Hilary Cass (2). De graves préoccupations concernant le Service de développement de l’identité de genre (GIDS) de la clinique Tavistock ont été soulevées par des parents, des membres du personnel et des gouverneurs, un premier jugement de révision judiciaire (3), la Care Quality Commission (4) et un tribunal du travail impliquant le responsable de la protection de l’enfance du Trust (5).

L’origine de cette mauvaise gouvernance et du manque de collecte de données doit être abordée ouvertement, car le cas du GIDS n’est pas unique. Dans le monde entier, il est très difficile de discuter, et encore moins de remettre en question, la pratique des cliniques de genre, en raison des systèmes de croyance de ceux qui adhèrent à la théorie de l’identité de genre – une perspective idéologique non clinique pour laquelle il existe peu ou pas de soutien empirique. Cette position exige des clinicien·nes qu’ils et elles adhèrent à la croyance que chaque personne possède une identité de genre innée et subjective et que les personnes dont le corps ne correspond pas à cette identité devraient bénéficier d’interventions médicales « d’affirmation du genre », quels que soient les inconvénients et l’absence de preuves des avantages de ces interventions (6,7,8). Cependant, le sentiment de genre d’un enfant ou d’un adolescent fait partie d’un sentiment intérieur complexe de soi qui peut changer au cours du processus de développement. Il est contraire à l’éthique de médicaliser les jeunes sur la base de théories non fondées : il existe de nombreuses raisons pour lesquelles ils et elles peuvent ressentir de la dysphorie, du dégoût, être dissocié·es ou « coupé·es » de leur corps physique, notamment une homophobie intériorisée, des antécédents de traumatisme, des difficultés cognitives et des problèmes de santé mentale. Chaque personne souffrant d’une telle détresse a besoin d’espace et de temps pour comprendre et interpréter ses émotions.

Proposer des bloqueurs de puberté, des hormones transsexuelles et une chirurgie radicale avec la promesse implicite d’une transformation presque magique peut causer, et a causé, de graves préjudices. En raison d’un suivi inadéquat par le GIDS, de l’absence d’études d’observation complètes à long terme et de données d’essais cliniques fiables, il n’existe tout simplement aucune preuve sur laquelle fonder ces interventions (2,6,7,8). Il n’est pas surprenant que des « détransitionneurs » (des personnes désillusionnées qui souhaitent inverser les effets  ces « traitements ») se manifestent aujourd’hui ; certains peuvent vouloir obtenir une réparation juridique et les cabinets voués aux droits de plaignant·es les approchent déjà (9). Sans information sur les résultats de telles interventions – sans parler de comprendre comment un enfant pré-pubère pourrait prendre la décision d’aliéner des fonctions adultes qu’il ne peut pas comprendre (comme le plaisir sexuel) – les patient·es et leurs parents n’ont jamais été en mesure de donner un consentement éclairé à des interventions expérimentales non contrôlées (6) que les clinicien·nes n’ont pas correctement décrites. Ces premiers cas pourraient en annoncer d’autres, car un nombre croissant de patient·es, de parents et de clinicien·nes remettent en question le « modèle affirmatif ».

Nous conseillons au National Health Service (NHS) de mettre en place de manière proactive des services cliniques pour soutenir les transitions, et au NHS Litigation Authority et aux organisations de défense médicale de se préparer aux recours annoncés. Le gouvernement devrait examiner de près les documents fournis par les lobbies (comme Stonewall, Mermaids, Gendered Intelligence, et d’autres) qui enseignent aux enfants et aux clinicien·nes (par exemple les médecins généralistes, les infirmières, les étudiant·es en médecine et les professionnel·les de la santé mentale) la théorie de l’identité de genre comme s’il s’agissait d’un fait, sans faire référence aux préoccupations et aux incertitudes quant aux éléments probants en cause. Tant que ce problème ne sera pas résolu, les jeunes risquent davantage d’interpréter à tort leurs difficultés complexes comme la preuve qu’ils et elles « sont trans » et de croire qu’il existe des solutions simples et médicales à leur détresse.

Lire sur le sitre du BMJ SIGNATAIRES : Dr Louise Irvine, General Practitioner; Dr Juliet Singer, Child and Adolescent Psychiatrist; Dr Aileen O’Brien, Consultant Psychiatrist; Dr Seth Bhunnoo, Consultant Psychiatrist; Dr Tessa Katz, General Practitioner; Dr Jane Martin, retired Consultant Psychiatrist; Stella O’Malley, Psychotherapist; Dr David Bell, retired Consultant Psychiatrist, former President British Psychoanalytic Society; Dr Bob Withers, Jungian Analyst; Dr Antony Latham, General Practitioner, Chair of Scottish Council on Human Bioethics; Dr Angela Dixon, General Practitioner; Dr Sinead Helyar, Registered Nurse; Dr Robin Ion, Registered Nurse; Dr Az Hakeem, Consultant Psychiatrist.

Références :

1) Clinical Advisory Network on Sex and Gender (CAN-SG) www.can-sg.org (accessed 28 August 2022)
2) The Cass Review. Independent Review of Gender Identity Services for Children and Young People: Interim Report. February 2022 https://cass.independent-review.uk/publications/interim-report/ (accessed 28 August 2022)
3) Bell & Another v The Tavistock And Portman NHS Foundation Trust [2020] EWHC 3274 (Admin) 1 December 2020 https://www.bailii.org/ew/cases/EWHC/Admin/2020/3274.html (accessed 28 August 2022)
4) Care Quality Commission. Tavistock and Portman NHS Foundation Trust Gender identity services Inspection report. 20 January 2021 https://api.cqc.org.uk/public/v1/reports/7ecf93b7-2b14-45ea-a317-53b6f48… (accessed 28 August 2022)
5) Employment Tribunal Decisions. Mrs S Appleby v The Tavistock and Portman NHS Foundation Trust: 2204772/201917 September 2020 https://www.gov.uk/employment-tribunal-decisions/mrs-s-appleby-v-the-tav… (accessed 28 August 2022)
6) Henegan C. Jefferson T. Gender-affirming hormone in children and adolescents. BMJ EBM Spotlight 2019 https://blogs.bmj.com/bmjebmspotlight/2019/02/25/gender-affirming-hormon…
7) NICE Evidence review: Gender-affirming hormones for children and adolescents with gender dysphoria. October 2020 https://segm.org/sites/default/files/20210323_Evidence%2Breview_Gender-a… (accessed 28 August 2022)
8) NICE Evidence review: Gonadotrophin releasing hormone analogues for children and adolescents with gender dysphoria. October 2020 https://segm.org/sites/default/files/20210323_Evidence%2Breview_Gender-a… (accessed 28 August 2022)
9) Cette lettre ouverte est une réponse rapide à l’article suivant publié dans le BMJ : Dyer C. Tavistock to face possible clinical negligence claims over gender identity service. BMJ 2022; 378:o2016 (12 August 2022)

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