Pourquoi les lesbiennes ne sont-elles plus les bienvenues aux défilés de la fierté gaie (Pride) ?

JULIE BINDEL pose, dans The Spectator du 28 août, la question « Quand deviendra-t-il évident que l’idéologie genriste est hostile aux femmes et aux filles, et en particulier aux lesbiennes? »

En tant que lesbienne qui ai fait mon coming out à l’époque du disque Life on Mars dans les années 1970, où l’on me disait régulièrement que tout ce dont j’avais besoin était « une bonne baise » pour me « corriger », j’ai assisté avec horreur à la diffamation des lesbiennes pour avoir fermement rejeté de leur cercles de rencontre les hommes qui se prétendent femmes.

La manifestation d’hier à Cardiff, filmée en direct (https://twitter.com/i/status/1563490240912044033), est un autre exemple de la façon dont le mot « lesbienne » est redevenu un gros mot.

Les femmes participant au défilé de la Pride Cymru portaient des bannières ornées des mots « Le transactivisme efface les lesbiennes » et « Les lesbiennes n’aiment pas les pénis », ce qui a provoqué une grande agitation dans la foule. Plutôt que d’interpeller les gens qui leur criaient des injures, la police a décidé d’éjecter du défilé les femmes du groupe Get the L Out. Ainsi, des lesbiennes ont été expulsées d’un soi-disant cortège de la Fierté tandis que le reste de la foule LGBTQQIA2Spirit+, dont beaucoup sont sans doute des kinksters hétérosexuels, a pu y rester.

L’hostilité que l’on voit persister chez les nouveaux queers cool à l’égard de toute lesbienne prend de l’ampleur depuis un certain temps. En 2018, lors de la première manifestation de Get the L Out, le MC masculin gay a plaisanté sur scène en disant que les manifestantes devraient être traînées hors du défilé « par leurs seins tombants ».

Une brève leçon d’histoire : la toute première marche de type fierté gaie à laquelle j’ai participé s’intitulait Lesbian Strength (Force lesbienne), et c’était en 1981. La majorité des lesbiennes impliquées dans le Gay Liberation Front des années 1970 avaient quitté l’organisation, car elles en avaient assez du sexisme des hommes qui la composaient. Il semblerait que les stéréotypes sexistes ne se limitent pas aux hétérosexuels. Les femmes ont depuis fait valoir que leurs besoins y étaient toujours placés au second plan par rapport à ceux des hommes, que des commentaires avilissants et souvent misogynes y étaient faits sur les femmes, et qu’on attendait d’elles qu’elles fassent le thé et s’occupent des hommes, tout comme des femmes hétérosexuelles.

Force lesbienne s’est avérée un merveilleux antidote à la misogynie du mouvement de fierté gaie. Elle signifiait que les lesbiennes, dont beaucoup ne souhaitaient pas être mises dans le même panier que les hommes, pouvaient être à l’avant-plan et au centre de leur propre mouvement de libération. Nous soutenions à l’époque – et je soutiens encore aujourd’hui – que les lesbiennes ont très peu de choses en commun avec les hommes gays, si ce n’est que nous sommes attirées par les gens de notre sexe. Les hommes gays ne sont pas confrontés à la double discrimination du sexisme et des préjugés anti-gays. Et, qu’on le veuille ou non, certains hommes gays détestent les femmes, tout comme certains de leurs frères hétéros.

Alors que la Gay Pride traditionnelle s’est peuplée de chars transportant des drag queens resplendissantes de paillettes et de glands, suivies par des nonnes en patins à roulettes, les lesbiennes ont cherché à continuer à rappeler au monde qu’il y avait de vrais problèmes à combattre, comme les femmes qui perdent leurs enfants à cause d’hommes violents, à cause de la bigoterie anti-lesbienne dans les tribunaux de la famille, à cause de l’hétérosexualité imposée et de la pression persistante à épouser des hommes et avoir des bébés, et à cause d’un manque total de compréhension du fait que les femmes ont le droit de contrôler leur sexualité.

Les lesbiennes en ont assez, comme nous l’avons vu lors du défilé de Cardiff hier. Si les homosexuels souhaitent transformer ce qui était autrefois une marche de protestation honorable en rien de plus qu’une fête de rue, et inclure les kinksters et les travestis sous le drapeau arc-en-ciel, c’est leur choix, mais les lesbiennes ont encore beaucoup de travail à faire.

Comme me l’a dit Angela Wild, membre fondatrice de Get the L Out, elles ont protesté contre ce défilé pour souligner le traitement épouvantable des lesbiennes par la foule identifiée comme queer, ainsi que le climat de coercition sexuelle dans lequel les lesbiennes doivent naviguer quotidiennement. « La façon dont nous avons été traitées, à la fois par la foule LGBT et par la police qui a refusé de nous laisser défiler et n’a pas réussi à nous protéger, est un reflet clair de l’image anti-lesbienne actuellement véhiculée par les transactivistes », a déclaré Angela Wild.

Dans sa déclaration, publiée après que les images du défilé soient devenues virales sur les médias sociaux, la police de Cardiff a affirmé que ce groupe bloquait volontairement le cortège, ce qui explique pourquoi on leur a demandé de partir. Mais ce que les lesbiennes faisaient en fait, c’était simplement de montrer au monde que c’en est assez, et que nous n’abandonnerons pas. Les femmes de Get the L Out sont, pour moi, le plus bel exemple de femmes refusant de capituler devant des exigences d’hommes. Être une lesbienne dans une société misogyne est sacrément difficile. Les transactivistes devraient savoir maintenant que nous, les lesbiennes, ne sommes pas faites pour virer capot.

Julie Bindel est une militante féministe contre la violence sexuelle et l’autrice de plusieurs ouvrages dont « Feminism for Women ».

Version originale: https://www.spectator.co.uk/article/why-are-lesbians-no-longer-welcome-at-pride-

Page Twitter de Get the L Out: https://twitter.com/GetTheLOutUK/status/1563490240912044033