La misogynie : Qu’est-ce que c’est, et pourquoi ne veut-elle pas mourir ?

Écrits et podcasts de Julie Bindel, 1er juin

Je suis Julie Bindel, bienvenue sur mon Substack personnel ! Ce média étant ce qu’il est, la plupart d’entre vous seront ici parce que vous connaissez déjà mon travail, mais pour celles et ceux qui ne le connaissent pas, laissez-moi vous parler un peu de mon parcours.

Je suis impliquée dans le féminisme depuis 1979, lorsque j’avais dix-sept ans et que j’ai déménagé dans la ville de Leeds. J’avais quitté ma famille dans le nord-est de l’Angleterre en raison du manque d’opportunités pour les filles de la classe ouvrière et peu instruites. Mes options étaient soit de trouver du travail dans une usine, soit de me marier jeune avec un homme de mon lotissement et d’avoir quelques enfants.

Disons simplement qu’aucune de ces options n’était pour moi ; j’étais une lesbienne déclarée et je ne voulais rien faire de tout cela. Je voulais rencontrer d’autres femmes comme moi. Leeds, à cette époque, était le centre d’un Mouvement de libération des femmes très dynamique, et à cette époque, là où il y avait des féministes, il y avait des lesbiennes. Je suis donc partie pour Leeds.

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À l’époque de mon arrivée, un tueur en série de femmes que la presse a surnommé « l’Éventreur du Yorkshire » avait assassiné 11 femmes dans le nord de l’Angleterre et ses environs, dont cinq à Leeds. J’ai rejoint le groupe Women against Violence against Women (WAVAW), créé pour protester contre la violence masculine, notamment la normalisation et l’augmentation de la consommation de pornographie violente et sadique. Ces féministes étaient des vraies : franches, courageuses, intransigeantes. L’atmosphère à Leeds à l’époque était un mélange de peur et de résilience et s’attaquer de front à la police et à la presse était exaltant. Un jour, un groupe d’entre nous a pris d’assaut le siège du journal Yorkshire Post et s’est retrouvé dans le bureau du rédacteur en chef. WAVAW lui avait écrit à plusieurs reprises, demandant une réunion pour discuter de la couverture épouvantable de ces meurtres, comme le titre suivant au sujet de l’assassinat de Jayne MacDonald, décrit comme une « erreur tragique » : elle avait 16 ans et était décrite comme « respectable et innocente ».

Nous étions en colère parce que les victimes étaient divisées en victimes méritantes et non méritantes ; pour la police et une grande partie de la presse, toute personne impliquée dans la prostitution, ou qui était simplement sortie boire dans des pubs de son propre chef avant d’être ciblée, « l’avait mérité ». Les féministes étaient en colère, et j’ai rapidement plongé tête baissée dans des campagnes visant à mettre fin à la misogynie qui alimentait le viol, la violence conjugale et le féminicide.

Je suis restée une militante active contre la violence masculine depuis 1979.

De la fin des années 1990 jusqu’en 2004, j’ai travaillé dans des universités en tant que chercheure sur le commerce du sexe, le viol et la violence conjugale. Après avoir écrit régulièrement des commentaires pour les journaux afin de mettre en valeur mon travail militant, j’ai réalisé que je serais bien plus heureuse en le faisant à plein temps et je suis devenue journaliste.

Alors, qu’en est-il de la question de la misogynie ?

Pendant toutes ces années d’écriture et de campagne, ma vie d’adulte a été définie par une question apparemment simple : qu’est-ce que la misogynie et pourquoi refuse-t-elle de disparaître ? Le dictionnaire définit la misogynie comme « un sentiment de haine à l’égard des femmes, ou la croyance que les hommes sont bien meilleurs que les femmes ». Mais cette haine est-elle le seul fait des hommes, ou les femmes peuvent-elles aussi être misogynes ? Les préjugés anti-gay, ou « homophobie », sont-ils sous-tendus par la misogynie, ou s’agit-il d’un phénomène entièrement différent ?

Il y a d’autres questions que je veux explorer dans le présent média. La misogynie devrait-elle être introduite comme un crime haineux dans la législation ? La misogynie devrait-elle être classée comme un crime de haine ? La haine des femmes se situe-t-elle à gauche ou à droite sur l’échiquier politique ? Qu’en est-il des enjeux de classe sociale ? Le statut social modifie-t-il la façon dont la misogynie est comprise et actualisée en Grande-Bretagne? Je compte me rendre dans un club privé d’élite pour poser cette question, ainsi que dans le lotissement où j’ai été élevée. S’agit-il simplement d’une question d’accents et de niveaux d’instruction différents ? Ou s’agit-il de quelque chose de plus fondamental que cela ?

D’aucuns affirment que la misogynie appartient plus ou moins au passé, ou qu’elle existe principalement en ligne. Pourquoi, alors, le taux de féminicides en Angleterre et au Pays de Galles a-t-il augmenté, bien que légèrement, depuis les années 1980 ? Les attitudes sociales peuvent changer, mais les statistiques des morgues ne mentent pas. Face à ces données, quelle différence ont fait des décennies de féminisme dans la quête pour mettre fin à la violence masculine mortelle ? Pouvons-nous revendiquer une quelconque victoire ?

Pour tenter de répondre à ces questions, j’ai une excellente brochette d’invité.es pour vous. Je vais interviewer la linguiste féministe de renommée mondiale, la professeure Deborah Cameron. Nous parlerons des origines du mot misogynie, et de la façon dont sa signification a changé au fil du temps. Cameron adoptera une approche critique de la surutilisation et de la mauvaise utilisation du terme, et nous examinerons comment il est souvent confondu avec le sexisme ou tout simplement avec les mauvaises manières.

Joan Smith, auteur du livre « Misogynies », sera aussi invitée sur mon podcast et me parlera du contexte dans lequel elle a écrit son livre, en 1989, et de la façon dont la situation est à la fois différente et identique aujourd’hui. Joan était une jeune reporter à l’époque des meurtres dits de l’Éventreur du Yorkshire et elle a vu et entendu des exemples terribles de haine des femmes de la part de collègues et d’officiers de police, ainsi que du grand public (principalement masculin).

Et les droits des hommes ?

Accrochez-vous à vos chapeaux, car j’interviewerai une figure clé du mouvement antiféministe des droits de l’homme afin d’explorer si lui et ses collègues activistes haïssent activement les femmes, ou s’ils sont simplement de vieux sexistes endurcis ?

Qu’en est-il des lesbiennes ? D’où vient la haine à notre égard ? Eh bien, vous vous dites peut-être « qu’en est-il des lesbiennes à rouge à lèvres, les lesbiennes chic ? ». Les lesbiennes sont très populaires, me direz-vous, et personne ne s’inquiète plus vraiment de voir deux femmes se tenir la main dans la rue. Si c’est le cas, qu’en est-il de la prévalence du viol punitif ? Qu’en est-il de l’opinion selon laquelle rejeter une personne dotée d’un pénis qui s’identifie comme une femme revient à être un « raciste sexuel » et est analogue au maintien du système d’apartheid en Afrique du Sud ? J’explorerai toutes ces questions au cours des prochains mois.

Les hommes qui paient pour du sexe détestent-ils les femmes ? Ou s’agit-il d’une transaction commerciale équitable entre l’acheteur et le vendeur ?

La prostitution est un sujet sur lequel j’ai longtemps fait des recherches et fait campagne pour y mettre fin. On m’a traité de misogyne pour avoir souhaité éradiquer le commerce du sexe, car je retire apparemment des choix aux « travailleuses du sexe » et je dis aux femmes ce qu’elles peuvent et ne peuvent pas faire avec leur corps. Mais qui sont les véritables misogynes dans ce débat, les féministes comme moi, ou les proxénètes, les prostitueurs et les propriétaires de bordels ? Et pourquoi la prostitution existe-t-elle ?

Souvent, lorsque j’en parle à des personnes bien intentionnées et libérales, elles me disent que je suis folle de penser qu’elle pourrait un jour être éradiquée parce que « c’est la profession la plus ancienne du monde » et « qu’il y aura toujours des femmes qui veulent vendre du sexe et des hommes qui veulent payer pour cela ». Mais pourquoi la prostitution est-elle considérée comme inévitable ? Qu’est-ce qui la sous-tend ? S’appuie-t-elle sur la haine des femmes ? Les femmes ne peuvent-elles être transformées en marchandises que si elles ont d’abord été déshumanisées ? Ce n’est pas de la misogynie ? Ou bien en est-ce ? Dans un podcast intitulé « La plus ancienne profession ou la plus ancienne oppression ? » je vais interviewer des voix opposées dans le débat, comme Rachel Moran, une survivante irlandaise du commerce du sexe et autrice du best-seller politique Paid For : My journey through prostitution (L’enfer des passes), et Nichi Hodgson, autrice de Bound To You (Liée à toi), décrit comme un aegumentaire pro-bondage.

Et qu’en est-il du porno ? S’agit-il simplement de prostitution derrière une caméra ? Ou est-ce, comme le soutiennent de nombreuses féministes, à la fois une cause et une conséquence de la haine de la femme ?

Je m’entretiendrai avec Gail Dines, la plus grande experte féministe mondiale de la pornographie et de ses effets. Tout le porno est-il misogyne ? Si la misogynie appartenait au passé, le porno existerait-il encore ? Le porno alimente-t-il la misogynie, ou est-ce au moins en partie la misogynie qui pousse les hommes à consommer du porno ? Robert Jenson, auteur de plusieurs ouvrages sur le féminisme et les méfaits de la pornographie, se joindra à nous.

J’ai visité l’Ukraine à de nombreuses reprises. C’est un pays que j’aime. En fait, j’y ai des racines familiales. L’une des tragédies de ce pays est la façon dont tant de ses femmes et de ses filles ont été réduites à un statut inférieur jusqu’à ce qu’elles n’aient pas plus de valeur intrinsèque que n’importe quelle autre marchandise. La prostitution, l’industrie des mariages par correspondance, le commerce des cheveux humains et, plus récemment, le commerce mondial des mères porteuses prospèrent tous dans les villes et villages d’Ukraine. Attendez-vous à mon rapport écrit et audio sur cette question dans les prochaines semaines.

Une visite au restaurant rapide/bar sportif Hooters à Nottingham, en Angleterre, où les serveuses doivent se vêtir de presque rien pour servir des groupes d’hommes qui les lorgnent, devrait me donner une idée de l’attrait de ce lieu. Comment les femmes se sentent-elles à l’idée d’y manger avec leur copain ? Pourrait-il y avoir un jour un tel endroit avec des serveurs masculins trébuchant en pagne pour servir des clientes ? Alerte spoiler : d’après mon expérience de la visite d’un club de danse-contact destiné à la clientèle féminine (il a fermé au bout de quelques semaines), je pense que non.

Plus encore…

En conversation avec Yagmur Uygarkizi, militante féministe vivant à Paris et membre du collectif Radical Girlsss, j’explorerai un récit sur lequel nous enquêtons toutes les deux depuis un certain temps : des milliers de femmes prostituées en Afrique et en Asie ont été utilisées dans des essais de médicaments de prévention du VIH, laissant certaines infectées par le virus. Ces essais sont peut-être encore en cours aujourd’hui.

Mes entretiens avec des femmes kurdes, dont une qui a survécu à l’une des prisons de Saddam Hussein, porteront sur le féminicide : le meurtre de femmes et de filles par des hommes parce qu’elles sont des femmes et des filles.

Je voyagerai beaucoup et ferai des reportages aux États-Unis, en Europe continentale, en Afrique de l’Est, en Amérique du Sud et ailleurs. Comme dans tout bon voyage, il se peut que je sorte légèrement des sentiers battus et que je prenne quelques détours intéressants, même si, à mon avis, tous les chemins mènent soit à la misogynie, soit à la campagne pour y mettre fin. Il est certain qu’il existe un contexte féministe pour tout, y compris la gastronomie, le vin, le hip hop et l’opéra, et je n’ai donc pas l’intention de trop limiter mon choix de sujets.

Parfois, je rapporterai des choses folles que je vois et entends au cours de mes voyages et de mon travail, comme lorsque Gian, un Italien d’âge moyen qui m’a vue à la télévision lors du lancement de mon livre en Italie, m’a contactée pour me suggérer que si je suis tellement contre la prostitution, pourquoi ne pas simplement encourager quelques femmes à offrir des relations sexuelles totalement gratuites à des hommes comme lui qui ne peuvent pas obtenir un vrai rendez-vous parce qu’il a, selon ses propres termes, « une personnalité terrible ».

Ou la fois où j’ai réussi à me faire enfermer dans un congélateur au Kosovo alors que je faisais des recherches sur les gangs de trafiquants d’êtres humains.

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Et la fois où, dans une maison close légale du Nevada, une proxénète m’a agité un pistolet au visage, si froide et vicieuse qu’elle rendait beaucoup de ses homologues masculins inoffensifs en comparaison.

Je publierai un article écrit chaque semaine (plus si l’envie m’en prend) et du contenu audio toutes les 3 à 4 semaines. Je publierai également des extraits audio hebdomadaires, y compris un avant-goût de ce qui est à venir plus loin.

Mon contenu sera gratuit pendant au moins les trois premiers mois, après quoi je mettrai le post occasionnel derrière un mur payant. J’évaluerai la situation à l’avenir et proposerai autant de contenu gratuit que possible. Je veux encourager les abonné.es, et j’apprécie particulièrement l’interaction avec mes lectrices et auditeurs. Alors sautez dans la section des commentaires, vous pourriez bien m’y trouver.

Version originale: https://juliebindel.substack.com/p/misogyny-what-is-it-and-why-wont?s=w&fbclid=IwAR2Xl_S-1pv5UwmAqjvIZemKwU5BruyDXgB1j9toxW6ABSbr5fQPgHKH4Io

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