La face sombre de l’arc-en-ciel

L’obsession américaine pour le marketing de la Pride auprès des enfants atteint des sommets alarmants.

The Critic, Artillery Row, 21 juin 2021

Par Josephine Bartosch

Les Britanniques se souviennent peut-être du personnage de Walter the Softie, dans la bande dessinée enfantine The Beano ? C’était l’ennemi juré du héros Dennis la Malice, un renifleur de fleurs, un personnage efféminé présenté comme ridicule. Aujourd’hui, Dennis serait envoyé suivre une formation pour résoudre son homophobie et Walter serait orienté vers l’aide aux victimes.

Qu’il s’agisse d’une véritable tentative d’expiation des préjugés à peine voilés du passé ou de l’exploitation de ce qui est devenu un phénomène marketing, The Beano célèbre cette année le mois des fiertés LGBTQ+. Pour marquer le 52e anniversaire de l‘émeute de Stonewall à New York, les célèbres pulls noirs et rouges de Dennis et Minnie ont été remplacés par des versions arcs-en-ciel. Le site Web du Beano propose plusieurs quiz sur l’histoire de la fierté gaie et la nécessité de l’acceptation des LGBTQ+, le tout avec une saveur résolument étasunienne.

Dans les bandes dessinées et les sitcoms, les clichés anti-gay de l’humour britannique sont remis en question à juste titre depuis de nombreuses années. En 2021, c’est l’inclusivité qui est de mise ; il est bien plus acceptable d’être homosexuel que d’être homophobe. Le branding arc-en-ciel des entreprises a atteint un point de saturation, et l’industrie de la diversité s’est donc tournée vers un nouveau marché : celui des enfants. Aujourd’hui, les programmes « éducatifs » promouvant la fierté LGBTQ+ auprès des enfants sont devenus une exportation culturelle américaine de premier plan.

En tête de file, les drag queens sont passées, avec leurs talons hauts de neuf pouces, de la niche des clubs gay au divertissement grand public pour enfants. Au début du mois, l’émission à succès du réseau Nickelodeon pour les tout-petits, Blue’s Clues & You, a publié un dessin animé pour promouvoir la fierté et « l’acceptation des LGBTQ+ ». Le dessin animé, raconté par la drag queen Nina West (alias Andre Levitt) sur un thème musical accrocheur, a depuis attiré plus d’un million de téléspectateurs.

Le défilé présente des dauphins non binaires et des castors transgenres, ainsi que divers autres animaux asexués, bisexuels et pansexuels. L’un des « castors transgenres » porte des cicatrices de mastectomie, ce qui laisse entendre que l’ablation des seins au nom d’une identité est un phénomène à célébrer.

Répondant aux éloges qui se multiplient sur les médias sociaux, Levitt a déclaré : « Lire tous les commentaires incroyables sur l’impact et la puissance de la dernière vidéo Blue’s Clues pour le défilé Pride auprès de tant de personnes est une source d’inspiration et d’humilité. La représentation est importante. Enseigner la gentillesse est important. »

Mais Il n’est pas nécessaire d’enseigner l’acceptation aux enfants ; c’est chez elles et eux un automatisme.

Il y a en effet un mensonge qui sous-tend un tel débordement dégoulinant d’esprit « woke » – les enfants n’ont pas besoin qu’on leur inculque la tolérance en bas âge ; c’est chez eux une qualité naturelle. Être un enfant, c’est en partie ignorer les contraintes sociales – et c’est bien sûr ce qui rend les enfants si vulnérables. S’il n’y a pas de mal à apprendre aux enfants qu’il existe de nombreux types de familles différentes et qu’à l’âge adulte, ils peuvent être attirés par l’un ou l’autre sexe, la promotion agressive de la fierté gaie auprès des enfants est au mieux inutile et, au pire, alarmante.

Le fabricant de vêtements New Look a récemment fait la une des journaux pour avoir vendu aux enfants des bikinis rembourrés. Bien que les avis soient partagés, l’imposition de normes sexuelles adultes à des préadolescents a été reconnue comme suffisamment litigieuse pour provoquer un débat national. Et pourtant, le défilé Pride – qui est par définition une célébration de la sexualité et de l’identité des adultes – est promu auprès des enfants sans hésitation et avec un minimum de réactions.

L’étalage débridé (ou même bridé) de la sexualité masculine est depuis longtemps une caractéristique des défilés Pride.

Aujourd’hui, de nombreuses personnes lesbiennes, gays et bisexuelles ne participent plus aux défilés de la Pride. Comme l’explique C. J. Liberty dans Lesbian and Gay News :

« En voyant les photos de mecs presque nus portant des masques de chien et menés à la chaîne par leurs maîtres, il est plus difficile de défendre la position selon laquelle la Pride ne concerne pas uniquement le sexe. Je penserais la même chose de n’importe quel groupe ou mouvement de la société. Les activités sexuelles entre adultes et les événements qui s’y rapportent doivent se dérouler dans un cadre intérieur, réservé aux adultes… [La Pride] est une journée familiale, commerciale et grand public qui ne se mélange pas avec des gens qui affichent des penchants sexuels entre adultes. »

L’étalage débridé (ou même bridé) de la sexualité masculine a longtemps été une caractéristique de la Pride. Mais alors que ce défilé devient de plus en plus axé sur la famille, de plus en plus de personnes s’interrogent sur la place des fétiches sexuels dans les défilés, notamment à la lumière de préoccupations historiques.

Les drapeaux arc-en-ciel et les paillettes présentent beaucoup d’attrait pour les enfants qui ne sont pas conscients de leurs connotations sexuelles et politiques.

L’infiltration des campagnes pour l’égalité des homosexuels par des pédophiles masculins à partir des années 1970 a jeté une ombre longue et honteuse sur la communauté gay. Mais la crainte d’offenser des homosexuels ne doit pas éclipser ce passé ; des groupes comme le Paedophile Information Exchange et la North American Man Boy Love Association ont longtemps cherché à utiliser les campagnes pour l’égalité des homosexuels au profit de leur lobbying. Bien que rien ne permette de penser que les homosexuels sont plus susceptibles d’agresser des enfants, les organisations pédophiles ont, pendant un certain temps, réussi à se faire accepter par le public en s’alliant à la libération gay.

En juin 1997, Peter Tatchell, militant pour les droits des homosexuels, a déclaré dans une lettre au Guardian que tous les rapports sexuels impliquant des enfants n’étaient pas nécessairement liés à la pédophilie. Il affirme aujourd’hui que sa lettre a été écourtée et qu’elle disait à l’origine que « la pédophilie était injustifiable ». Pourtant, cette lettre défendait un livre pro-pédophilie intitulé Dares to Speak, dans lequel Tatchell avait rédigé un chapitre. Aujourd’hui, Tatchell joue le rôle de parrain d’Educate & Celebrate, une organisation caritative qui propose aux écoles des formations sur la diversité LGBTQ+.

Il est juste de se demander à qui profite le fait de dire aux enfants que pour « être gentil », ils doivent suspendre toute curiosité naturelle et traiter les gens sur la base de leur identité déclarée. Il est juste de se demander pourquoi des procédures telles que le changement de sexe sont présentées comme normales aux enfants d’âge préscolaire.

La peur d’être accusé de certaines « phobies » étouffe des questions et des débats légitimes.

Une recherche publiée en 2018 sur les raisons pour lesquelles certains médecins généralistes refusent d’orienter les clients transidentifiés vers des cliniques d’identité sexuelle note qu’une des raisons de ces hommes pour « chercher à changer de sexe » est le désir de « faciliter ou de normaliser la pédophilie. Les membres de ce groupe restreint décrivent le changement de sexe comme un moyen d’augmenter leurs contacts intimes avec les enfants, contacts qu’ils considèrent comme plus acceptables socialement dans un rôle féminin ».

La peur d’être accusé-e de certaines prétendues « phobies » étouffe des questions et des débats légitimes sur le rôle des entreprises qui imposent aux enfants des concepts d’adultes – et sur leurs motivations pour le faire.

Supprimer les stigmates liés au fait d’avoir deux mères ou deux pères, et prévenir les brimades à l’encontre des garçons efféminés et des filles vigoureuses dans les écoles, est un résultat souhaitable et bienvenu. Mais il faut se demander comment les enfants sont servis par un programme politique agressif, contrôlé depuis les États-Unis, qui enseigne aux enfants que l’acceptation compte plus que la pensée critique.

Les drapeaux arc-en-ciel, les drag queens, les défilés et les paillettes ont bien sûr un attrait pour les enfants inconscients des connotations sexuelles et politiques de ces symboles. Pour protéger les enfants, nous devons être conscients de la réalité des adultes, à savoir que la face sombre de l’arc-en-ciel peut cacher un programme peu recommandable.

Josephine Bartosch

Traduction : TRADFEM

D’abord publié dans The Critic – https://thecritic.co.uk/dark-side-of-the-rainbow/

Tous droits réservés au média The Critic et à Josephine Bartosch, 2021.

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5 réflexions sur “La face sombre de l’arc-en-ciel

  1. La face sombre de l’arc en ciel c’est aussi la promotion de la pornographie et de la prostitution.
    Les lesbiennes sont, dans le courant LGBTQI+, les dindes de la farce. Elles n’ont pas voix au chapitre.

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  2.  » il est bien plus acceptable d’être homosexuel que d’être homophobe » : pour moi, cette phrase se comprend comme une tentative de rendre équivalent, du point de vue moral, une orientation sexuelle et une pulsion haineuse déguisée en idéologie politique. C’est tendancieux ou c’est une question de traduction que je n’aurais pas comprise ?

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    • Il faut conceptualiser:
      « Dans les bandes dessinées et les sitcoms,

      les clichés anti-gay de l’humour britannique sont remis en question à juste titre depuis de nombreuses années.

      En 2021, c’est l’inclusivité qui est de mise ; il est bien plus acceptable d’être homosexuel que d’être homophobe. Le branding arc-en-ciel des entreprises a atteint un point de saturation, et l’industrie de la diversité s’est donc tournée vers un nouveau marché : celui des enfants. Aujourd’hui, les programmes « éducatifs » promouvant la fierté LGBTQ+ auprès des enfants sont devenus une exportation culturelle américaine de premier plan. »

      Je traduirais par: actuellement il vaut mieux se dire inclusif à tous les niveaux que ‘phobe’

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      • Je vous remercie de votre réponse.

        Je ne suis pas sûre de cette lecture : la phrase ne parle pas de l’inclusivité au sens dévoyé du terme (« inclusif » actuellement : être anti-féministe au nom de la bienveillance), mais de l’homosexualité précisément. La formule n’est pas générale. Il n’est pas marqué ‘il vaut mieux être inclusif que l’inverse ». Il est bien écrit qu’il vaut mieux être homosexuel que de haïr les homosexuels (le sens du mot « homophobe »).
        Pour moi, c’est donc bien tracer une équivalence entre « être homosexuel » et « être homophobe », et le sens de cette phrase précise me semble être « aujourd’hui, être homophobe c’est comme hier être homosexuel : un risque ».
        Et je trouve qu’il faut éviter ce genre d’équivalence, même sous couvert de sarcasme, parce qu’il n’y a en réalité aucune équivalence entre les violences subies, historiquement, par les homosexuels, et celles qu’auraient pu subir des homophobes. Aucun massacre de masse d’homophobes par exemple.
        Donc je trouve cette équivalence outrancière, à mauvais escient (dans le meilleur des cas).

        Cela ne veut pas dire que l’article n’est pas intéressant, il l’est pour le reste. Mais cela ne doit pas empêcher de relever ce qui peut poser problème, car d’autres se feront un plaisir de le faire, si ils pensent que cela peut permettre de discréditer le site à peu de frais.

        Tout cela, sous réserve d’avoir bien compris le passage, évidemment.

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        • Vous avez raison, cette équivalence est, a minima, maladroite.
          Par contre, aujourd’hui, il vaut mieux être Trans que TERF…. Là, la haine se déchaîne.

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